Le Document d’Entrée en Relation (DER) ne devrait plus vous être inconnu, mais en tout cas il n’aura jamais été autant d’actualité qu’en 2025.
Ce document, souvent perçu comme une formalité administrative, est en réalité un véritable socle de transparence et de conformité dans les activités de courtage bancaire et d’assurance.
En cette période marquée par une méfiance croissante des consommateurs envers les acteurs financiers, le DER s’impose comme une pièce maîtresse du parcours client, car, il ne s’agit pas simplement de “remplir un papier” bien rédigé et bien présenté, il peut changer la perception que le client a de son intermédiaire. Voyons comment.
Retour sur les Fondements du DER
Avant 2020, le DER était parfois relégué au second plan, remis rapidement en début de dossier, sans explication ni contexte.
Pourtant, les textes sont clairs : l’article R.519-20 du Code monétaire et financier impose une information précontractuelle complète à l’IOBSP.
De même, le Code des assurances exige cette transparence dans la relation entre un intermédiaire et son client.
Le DER a pour objectif premier d’éclairer le client, c’est-à-dire qui est l’intermédiaire, comment est-il rémunéré, avec qui travaille-t-il, et quels sont ses devoirs envers lui ?
Il s’agit d’un engagement tant moral que juridique et s’applique pour toutes les activités déclarées : crédit immobilier, crédit à la consommation, regroupement de crédits (RAC), et assurance emprunteur.
2020-2023 : Vers une fusion des documents et des statuts
Avec l’essor du métier d’IOBSP et l’accroissement des doubles casquettes (crédit + assurance), de nombreux professionnels ont commencé à réunir leurs obligations dans un seul DER.
C’est une pratique aujourd’hui tolérée, voire encouragée, tant que les mentions obligatoires sont bien respectées.
Des enseignes comme CAFPI ou Vousfinancer ont mis en place des DER fusionnés, comportant à la fois les mentions IOBSP et IAS permettant de gagner en efficacité, mais surtout en clarté pour le client, qui comprend plus facilement à qui il a affaire.
Il est donc parfaitement possible de faire un seul DER regroupant les activités de crédit immobilier, de RAC et d’assurance emprunteur, à condition de bien distinguer les obligations propres à chaque statut et d’assurer une lecture claire.
2024-2025 : La réglementation s’affirme, les pratiques évoluent
En 2024, plusieurs contrôles de l’ACPR ont donné lieu à des rappels fermes concernant l’insuffisance de certains DER : absence de mention RGPD, omission des liens capitalistiques avec les banques ou assureurs, flou sur le statut exact de l’intermédiaire. Ces défauts, pourtant facilement évitables, ont mis en lumière une certaine légèreté encore présente dans le secteur.
Aujourd’hui, le DER est considéré comme une preuve incontournable de conformité puisqu’ il engage l’IOBSP, mais il le protège aussi.
En cas de contentieux, il peut faire foi si son contenu est complet, daté, signé, et remis avant toute proposition ou simulation.
Le Contenu Obligatoire : Rigueur et Exhaustivité
Le DER doit comporter, au minimum, les informations suivantes :
- Identité de l’intermédiaire (raison sociale, adresse, forme juridique)
- Statuts (IOBSP / IAS), catégories, numéros ORIAS distincts
- Nature des crédits traités : immobilier, consommation, RAC
- Nom de l’assureur RCP, montants de garantie
- Existence de liens capitalistiques avec des partenaires
- Nombre de partenaires consultés ou liste nominative
- Mode de rémunération : commissions, honoraires, avantages en nature
- Procédure de réclamation, coordonnées du médiateur
- Information RGPD sur le traitement des données
En tant que juriste, j’observe que de nombreux modèles de DER n’intègrent pas encore toutes ces dimensions, notamment lorsqu’ils sont fusionnés et cela crée un risque juridique inutile pour des IOBSP pourtant de bonne foi.
La Digitalisation au Service de la Conformité
La signature électronique, l’horodatage et l’archivage numérique des DER sont aujourd’hui des outils incontournables.
En 2025, il n’est plus acceptable de ne pas pouvoir retrouver un DER signé quand des plateformes comme Docusign, Yousign facilitent une traçabilité optimale.
Mais au-delà de la technique, c’est le discours qui compte : expliquer le DER, le lire avec le client, répondre à ses questions.
Ce temps investi dès le départ renforce la relation de confiance et évite des incompréhensions futures.
En tant qu’IOBSP, vous êtes souvent la première personne à qui le client pose ses questions. Le DER est votre carte de visite juridique, savoir l’expliquer, c’est déjà protéger votre client.
Et si on osait aller plus loin ?
Et si on cessait de voir le DER comme une contrainte et qu’on le considérait comme un outil de transparence active ? Un moment clé du parcours client ? Une démarche d’éducation financière en soi ?
Dans une époque où les arnaques pullulent, où la confusion règne entre les vrais conseillers et les vendeurs de solutions miracles, le DER est une balise.
Il fixe le cadre, donne un visage au professionnel, et rappelle que la finance ne se fait pas dans le flou.
Professionnels du courtage, soyez fiers de remettre ce document.
Non seulement vous répondez à une obligation, mais vous affirmez une posture : celle de l’intermédiaire intègre, responsable, et transparent. Car ce qui distingue un professionnel d’un exécutant, c’est justement sa capacité à expliquer, à rassurer, à encadrer.
Le DER n’est pas la fin d’une formalité, c’est le début d’une relation de confiance.
Et si la vraie modernité en 2025, c’était d’assumer pleinement cet engagement ?
Par Charles-Hubert MEYERGUE
Juriste à l’IEPB